Mycoplasma pneumoniae

Mercredi 29 Novembre 2023
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Mise au point sur les infections à Mycoplasma pneumoniae

Les Mycoplasma pneumoniae (Mp) sont de toutes petites bactéries pléomorphes strictement humaines, dépourvues de paroi cellulaire, ce qui explique que d'une part elles ne sont pas visibles à la coloration de Gram et que les ß-lactamines sont inactives. Ce sont des bactéries liées aux cellules. La durée d'incubation est de 1 à 4 semaines. Les infections à Mp surviennent dans le monde entier, en toute saison et dans tous les environnements géographiques, sur un mode endémo-épidémique. Certaines années, les épidémies peuvent être intenses.

Mp est transmissible par des gouttelettes respiratoires lors d'un contact étroit avec les personnes infectées le plus souvent symptomatique. C'est ce qui explique que lorsque les mesures « COVID » étaient appliquées il y a eu un effondrement des pathologies à Mp. En 2023, une remontée franche a été observée dans de nombreux pays (dont la Chine) : l'épidémie parait plus intense que les années précédentes (dette immunitaire ?), mais des épidémies plus intenses cycliques ont déjà été rapportées à plusieurs reprises.

Le portage asymptomatique après l'infection voire avant, peut durer des semaines, voire des mois. C'est ce qui explique qu'une PCR positive est fréquente chez l'enfant sans symptôme (jusqu'à 20% dans certaines études). L'immunité après l'infection n'est pas de longue durée. Cependant, les infections expérimentales montrent que les patients présentant les symptômes les plus sévères sont ceux qui n'avaient pas préalablement d'anticorps.

La physiopathologie des infections à Mp est complexe, diverse (notamment en fonction des manifestations cliniques observées) et imparfaitement connue.

  • Mp produit des toxines notamment la CARDS qui peut induire directement des lésions.
  • Il induit surtout des lésions inflammatoires et auto-immunes. Si la production de cytokines et l'activation des lymphocytes peux minimiser la maladie et éliminer les mycoplasmes, elle peut aussi exacerber la maladie par une hypersensibilité immunologique, une aggravation des lésions de l'épithélium respiratoire. Plus la stimulation des cytokines et l'activation cellulaire sont vigoureuses, plus la maladie s'aggrave.

Clinique

L'incidence des infections à Mp est la plus élevée chez les enfants âgées de 5 à 15 ans, tandis que le pourcentage est le plus élevé à la fin de l'adolescence et au début de l'âge adulte, lorsque les infections respiratoires dues à d'autres causes sont moins fréquentes. Les infections à Mp sont rares chez les moins de 4 ans et de plus de 60 ans. C'est une cause fréquente d'infections des voies respiratoires supérieures et inférieures (rhino-pharyngite, trachéo-bronchite et bronchite aiguës pneumonie…). Les symptômes sont variables et comprennent la toux, la malaise, la fièvre et occasionnellement des maux de tête. La bronchite aiguë et les infections des voies respiratoires supérieures à Mp sont généralement bénignes et guérissent spontanément. Environ 25% des enfants d'âge scolaire (> 5 ans) infectés développeront une pneumonie avec toux et râles à l'examen physique dans les jours suivant le début des symptômes constitutionnels. La toux, initialement non productive, peut devenir productive, persister pendant 3 à 4 semaines et être accompagnée de sifflements. L'infection a été associée à des exacerbations de l'asthme. Environ 10% des enfants atteints d'une infection à Mp présenteront une éruption cutanée, le plus souvent maculopapulaire.

Une pneumonie sévère avec épanchement pleural peut survenir, en particulier chez les patients atteints de drépanocytose, de trisomie 21, d'immunodéficiences et de maladies cardiorespiratoires chroniques. Le syndrome thoracique aigu a été associé à Mp chez les patients atteints de drépanocytose.

Les anomalies radiographiques sont variables : des infiltrats diffus bilatéraux (pneumopathie atypique) ou des pneumonies d'allure franche lobaire aigue mais résistantes aux pénicillines parfois épanchement pleural.

Des manifestations cliniques extra-pulmonaire inhabituelles comprennent :

  • des affections du système nerveux (méningite aseptique, encéphalite et encéphalomyélite disséminée aiguë, ataxie cérébelleuse, myélite transverse et neuropathie périphérique),
  • des myocardites, péricardites, arthrites (en particulier chez les hôtes immunodéprimés),
  • un érythème noueux, des éruptions cutanées mucocutanées polymorphes (par exemple, le syndrome de Stevens-Johnson ou le syndrome d'éruption cutanée et de mucosite induit par Mycoplasma [MIRM]),
  • une anémie hémolytique, une purpura thrombopénique et des syndromes hémophagocytaires.

Les outils du diagnostic biologique reposent sur :

  • D'une part la PCR, sensible et spécifique, souvent intégré dans les kits de PCR multiplex. Le principal écueil est que de nombreux enfants sans symptôme ou avec des symptômes mineurs ont une PCR positive. Le risque est d'attribuer les symptômes observés à tort à Mp. Les PCR multiplex retrouvent souvent des virus associés. Il semble que les co-infections puissent être plus sévère.
  • D'autre part les tests sérologiques: en général, les anticorps IgM ne sont pas détectables au cours des 7 premiers jours suivant l'apparition des symptômes. Bien que la présence d'anticorps IgM puisse indiquer une infection récente, des faux positifs peuvent se produire, et les anticorps IgM peuvent persister dans le sérum pendant plusieurs mois, voire plusieurs années, et ne pas indiquer une infection aiguë. Le diagnostic sérologique est mieux établi en démontrant une augmentation au moins quadruple du titre en anticorps IgG entre les échantillons de sérum « aigu » et « convalescents ».
  • La mesure du titre d'hémagglutinines froides sériques a une valeur limitée, car des titres de ≥1:64 ne sont présents que chez 50% à 75% des patients, et des titres plus bas sont présents de manière non spécifique au cours des infections virales.

Traitement

L'immense majorité des infections à Mp guérissent spontanément. Les preuves du bénéfice de l'antibiothérapie pour les enfants non hospitalisés présentant une infection respiratoire basse attribuable à Mp sont limitées. Cependant, malgré la rareté des études, il est raisonnable de traiter :

  • les pneumopathies hospitalisées et ambulatoires s'accompagnant de symptômes marquées. La circonstance la plus fréquente est une pneumopathie avec fièvre élevée, traitée par amoxicilline et dont la température élevée persiste au-delà de 48 heures. Deux types d'examens peuvent aider :
    • une radio de thorax pour éliminer un épanchement pleural (qui a tendance à prolonger a fièvre dans les pneumopathies et justifiera une consultation hospitalière).
    • une CRP et/ou PCT (elles sont généralement peu augmenté dans les infections à mycoplasmes et les infections virales, contrairement aux infections à pneumocoque)
  • les infections extra-pulmonaires graves telles que les maladies du système nerveux central ou l'arthrite septique chez un patient immunodéprimé.

Les antibiotiques actifs sur Mp sont :

  • les macrolides traitement de référence, mais 5 à 10% des souches seraient résistantes dans les pays occidentaux et 80% en Chine :
    • clarithomycine 5 jours
    • azithromycine 3 jours (la posologie Française qui correspond à 5 jours de la posologie américaine).
  • la doxycycline (qui n'est plus contre-indiqué pour les moins de 8 ans pour des traitements de moins de 2 semaines) 7 jours
  • les quinolones (en principe contre-indiquées chez l'enfant).

Il est suggéré que les deux dernières familles d'antibiotiques seraient plus efficaces pour les formes neurologiques.

 

Références

  • American Academy of Pediatrics. [Mycoplasma pneumoniae] In: Kimberlin DW, Barnett ED, Lynfield R, Sawyer MH, eds. Red Book: 2021 Report of the Committee on Infectious Diseases. Itasca, IL: American Academy of Pediatrics: 2021[343-348]
  • Waites KB, Xiao L, Liu Y, Balish MF, Atkinson TP. 2017. Mycoplasma pneumoniae from the respiratory tract and beyond. Clin Microbiol Rev 30:747–809. https://doi.org/10 .1128/CMR.00114-16.
  • Meyer Sauteur P, Beeton M. https://www.thelancet.com/action/showPdf?pii=S2666-5247%2823%2900182-9
  • Meyer Sauteur PM, Beeton ML, Uldum SA, et al. Mycoplasma pneumoniae detections before and during the COVID-19 pandemic: results of a global survey, 2017 to 2021. Euro Surveill 2022; 27: 2100746.
  • Meyer Sauteur PM, Chalker VJ, Berger C, Nir-Paz R, Beeton ML. Mycoplasma pneumoniae beyond the COVID-19 pandemic: where is it? Lancet Microbe 2022; 3: e897
  • Spuesens EB, Fraaij PL, Visser EG, et al. Carriage of Mycoplasma pneumoniae in the upper respiratory tract of symptomatic and asymptomatic children: an observational study. PLoS Med 2013;10(5):e1001444.

 Robert Cohen, Odile Launay, Franck Thollot, Isabelle Hau

 

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